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Quand l'entrepreneuriat démontre l’intérêt économique de l’immigration en France

Rédigé par Les Cuistots Migrateurs | Nov 20, 2025 8:30:00 AM

Le débat sur le coût de l’immigration en France monopolise l'espace médiatique et politique depuis des années. Pourtant, derrière les discours alarmistes se cache parfois une réalité bien différente : celle des entrepreneurs qui démontrent, par l'exemple, que l'accueil des réfugiés peut contribuer à l’économie. Récit de notre modèle : Les Cuistots Migrateurs.

Le « coût » de l'immigration : déconstruire un mythe par les faits et l'exemple

En février 2016, Les Cuistots Migrateurs ont fait le pari d'employer des réfugiés statutaires en leur donnant la possibilité de partager leurs talents culinaires. Par conviction morale et entrepreneuriale. Récit.

 

Les chiffres sur l'immigration et la réalité

La question « combien rapporte l'immigration France » mérite d'être posée autrement. Plutôt que de chercher un bilan comptable macro, il faut observer les trajectoires individuelles. Louis Jacquot, cofondateur des Cuistots Migrateurs explique : « Faeeq, premier salarié des Cuistots Migrateurs, est arrivé sans parler français et sans expérience en cuisine. Aujourd'hui, il est second de cuisine, a acheté un appartement, une voiture, et voyage en Europe. » Aujourd’hui, il contribue à l’économie de son pays d’accueil comme n’importe qui et comme de nombreux autres réfugiés qui ont été accueilli par des entreprises comme Les Cuistots Migrateurs. 
Au-delà même de cet apport économique, les réfugiés enrichissent la France grâce à la culture et au savoir qu'ils apportent. Cette dimension est primordiale. « Nous sommes une génération à la recherche d'une voie ouverte au monde, où le contact avec l'étranger est synonyme de richesse et d'épanouissement. Cette vision cosmopolite est une cause qui vaut la peine d'être défendue », affirment les fondateurs des Cuistots Migrateurs.
Aux Cuistots Migrateurs, nous avons donné corps à cette idée en proposant des services traiteurs dont les plats sont conçus et pensés par des réfugiés.

L'intégration est un engagement qui a de la valeur

Dès le départ, les Cuistots Migrateurs ont fait le pari d’une entreprise engagée dont le fonctionnement repose entièrement sur son activité de traiteur. « Nous ne sommes pas une association, » précise Louis Jacquot. Il ajoute : « Notre service n'a pas reçu d’aides spécifiques pour grandir. Le développement s'est fait sur les ventes et l'activité. » Comme n’importe quelle autre entreprise. 
Pour mener à bien ce rêve entrepreneurial, lui et Sébastien Prunier, cofondateur, ont adopté une approche prudente et progressive. Louis : « Nous n’avons pas levé de fonds tout de suite. L'entreprise a adopté une croissance progressive, avec un investissement personnel minimal. Cette approche prudente nous a permis de prouver notre concept, notre différenciation et notre capacité à créer des emplois. »
Les preuves une fois faites, Les Cuistots Migrateurs ont alors pu, dans un second temps, solliciter des fonds à impact, qui les ont accompagnés dans leur développement.

 

Un discours immigrationniste ? Non, juste quelques vérités

Non, les réfugiés ne « volent » pas les emplois : ils répondent à des besoins

Le terme "immigrationiste", utilisé de manière péjorative par certains discours pour décrire ceux qui défendent une politique migratoire accueillante, repose sur un présupposé erroné : les réfugiés « voleraient » les emplois des Français. 
La réalité est tout autre. Les réfugiés employés occupent souvent des positions dans des secteurs confrontés à une pénurie de main-d'œuvre. La restauration en est un exemple emblématique.« Selon les statistiques, il y aurait entre 100 000 et 400 000 postes à pourvoir dans la restauration », rappelle Louis Jacquot.
Les Cuistots Migrateurs illustrent cette réalité : l'entreprise répond à un besoin économique concret en formant et en embauchant des cuisiniers réfugiés dans un secteur qui peine à recruter. L'intégration par le travail de personnes qualifiées ou en cours de formation ne constitue pas une menace pour l'emploi, mais une réponse pragmatique à une demande non satisfaite.

 

Oui, entreprendre avec une mission sociale est un engagement

Derrière cette aventure entrepreneuriale, il y a une idée forte : une intégration par le travail ne repose pas uniquement sur la volonté du réfugié. Louis Jacquot : « L’idée sous-jacente du discours ambiant est que le réfugié est le seul à devoir faire l'effort pour s'intégrer par le travail. Néanmoins, la composante de l’entrepreneur est importante. Il faut les deux mouvements. »
Les Cuistots Migrateurs ont ainsi fait du CDI leur priorité absolue. Louis : « Ce type de contrat est corrélé à une stabilité de vie essentielle. Tant qu'ils ne l'ont pas, les réfugiés n’arrivent pas à construire un projet personnel et professionnel sereinement. Leur apporter cette stabilité était essentiel. »
C’est aussi un effort à faire et un équilibre à trouver. « On a rencontré des gens qui, au-delà du niveau de français, n’avaient pas d’expérience en cuisine professionnelle, explique Louis. Il a donc fallu encadrer, former et accompagner. Il faut de la souplesse, de la patience, de la compréhension, de l’attention — sans devenir assistant social, car ce n’est pas notre rôle. »
Pour tout cela, l’engagement de l’entrepreneur est essentiel mais la réussite est souvent sans pareil. Aujourd’hui, les plats sont réalisés par les cuisiniers à partir de leurs propres recettes. « Aux fourneaux, ils font parler leurs racines et leurs secrets de famille », raconte Louis. Pari réussi.

 

Conclusion

Le débat sur le coût immigration en France gagnerait à s'enrichir d'exemples concrets plutôt que de rester prisonnier d'abstractions comptables. Aux Cuistots Migrateurs, nous pouvons ainsi dire qu'un modèle économique viable peut naître de l'intégration par le travail de réfugiés statutaires. Notre entreprise solidaire, créée en 2016 sans aides publiques, est aujourd'hui en croissance. En plus des 13 réfugiés employés actuellement en CDI, d’autres réfugiés sont passés par chez nous et nous avons pu constater à chaque fois que le CDI leur a permis de se stabiliser en France et de rebondir.
L'entrepreneuriat engagé prouve qu'il n'y a pas de fatalité à choisir entre performance économique et impact social. Les deux peuvent se renforcer mutuellement, à condition d'accepter que la contribution économique de l’immigration ne se mesure pas uniquement en euros, mais aussi en innovation, en diversité culturelle et en cohésion sociale. Cette vision cosmopolite n'est ni naïve ni idéologique : elle est pragmatique et économiquement viable.